L’Article « les pertes qui coûtent » écrit suite à un entretien à bâtons rompus, une philosophe et une sophrologue échange sur le thème de la mort, du deuil en 2020.
Participante : Florence Legouge, sophrologue et guérisseuse.
Rédacteur : Guillaume Rosquin, philosophe d’entreprise.
Le texte –Les pertes qui coûtent
Woody Allen disait que « la vie est une maladie mortelle sexuellement transmissible » mais il y a des disparitions de proches qui sont plus difficiles que d’autres à supporter. Les latins appelaient l’âme anima, ce qui fait que le vivant est animé, croît, se nourrit, interagit avec d’autres vivants, et se reproduit, qu’il soit animal ou végétal. Et lorsqu’il vient à mourir cet anima le quitte, il devient inerte. Est-ce alors aussi banal que d’éteindre un ordinateur que l’on peut rallumer à volonté ? Est-il possible comme le disaient les anciens que cette âme perdure et se manifeste parfois comme un fantôme ? Pourrions-nous souffrir d’hallucinations lorsqu’un lieu porte la mémoire d’un disparu ?
Car la période difficile pour les survivants peut précéder le décès en cas de présage funeste, ou survenir au moment de l’annonce de la perte. Il devient à ce moment-là très difficile d’engager un dialogue pendant cette douleur pour l’apaiser, l’accepter. Ces mots se chargent d’un jugement, d’une remise en cause des faits, de l’éventuel accident ou de la maladie, et il convient de ne pas froisser davantage pour ajouter l’agacement aux regrets. On est véritablement soi-même dans ces moments-là, on quitte son costume de fonction plus grand que l’être que nous sommes, et la sensation d’exister prend tout son sens lorsque quelqu’un n’existe plus. S’y ajoute les cas où le mourant voulait continuer à vivre, ou au contraire souhaitait sa fin, et l’ait peut-être même provoquée.
A quoi comparer la mort ?
Il est fréquent en France de se comparer les uns aux autres. Des morts paraissent plus belles que d’autres, alors qu’il serait plus rationnel de comparer des beautés de vies. Dès l’enfance, nous sommes entraînés dans des classements, des notations, des classes sociales, et des jeux de pouvoir. Comment alors supporter la perte d’un être qui donnait un sens à votre vie, vous fournissait une référence de bonté ? Cet attachement peut-il se révéler masochiste ? On pensait juste aimer et on perd en fait une partie de soi-même. Qui sommes-nous donc alors s’il nous faut des compagnons pour nous croire nous-mêmes ? Notre conscience de nous-même, l’un des sujets de la psychologie sociale américaine, ne passe-t’elle que par notre corps et notre âme, ou a t’elle besoin des autres pour exister ?
C’est en cela que le deuil questionne qui nous sommes réellement. Cette valeur que l’être aimé nous indiquait par son affection disparaît, nous nous retrouvons face à nous-mêmes. Un miroir s’est brisé. Ce regard sur nous-mêmes, entraîné par notre éducation, se perd à tout jamais, et nous ne sommes plus rien, dévastés. Dans ce chagrin qui nous prend c’est une partie de nous-mêmes qui s’effondre. Cet autre que nous serait-il alors un tyran nous faisant payer la perte de son plaisir de vivre, de sa jouissance à nous valoriser, à le reconnaître comme un barème ? Faut-il être absous d’un décès ?
L’amour et l’individu
Ces deuils difficiles pourraient donc être une difficulté dans l’individuation, où la création de liens a dépassé le simple plaisir de vivre ensemble, de s’entraider. Cette fonction de guide que peuvent prendre les personnes qui nous sont chères peut devenir fusionnelle. Heidegger disait que le logos, la langue qu’on emploie, a au départ une fonction de rassemblement, avant d’être devenue avec la philosophie socratique un outil de raisonnement logique. Il s’agit donc de se parler ensemble pas seulement avec son mental mais aussi avec son cœur, dans une spiritualité élargie, sans que cela atteigne notre être par la parole de l’autre. Ce « cœur » étant la conjonction des émotions et des pensées, comme une boussole de notre existence.
L’amour d’un prochain doit donc se faire par ce cœur comme un αγάπη, un amour affectueux, tel celui de la parabole du bon samaritain, un espace entre le corps physique et le corps spirituel. Le décès devenant une dissociation du physique et du spirituel qui agrandit cet espace, mais ne remet pas en question l’amour qui existait. Car nos sensations sont elles aussi dans cet espace qui lie le physique à l’âme, et il devient aisé de comprendre pourquoi ces pertes peuvent causer une sensation qui prend le ventre, torture. Écouter son cœur est donc être à l’écoute des sensations, les connaître, tout en restant soi-même dans son individualité, pour ne pas périr de la séparation.
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